Bon aller après avoir tergiversé un moment je me lance. Voici une nouvelle que j'ai écrite cet été, et j'aimerai bien avoir votre avis dessus. Alors n'hésitez pas toute critique ou suggestion est bienvenue.
En espérant que ça vous plaise un minimum.
Dans la nuit
Il faisait sombre dans le château. A la lumière de la pleine lune il paraissait sinistre. Les ombres s'étendaient dans toutes les pièces. Tout était calme. Comme dans un film d'épouvante, juste avant de voir sortir le monstre du placard. C'est à ce moment là que les spectateurs sursautent en criant. Pourtant ici rien ne se passe. J'attends depuis des heures, assise sur ce canapé que le monstre surgisse devant moi, que ce monstre prenne ma vie. Mais rien. Je commence à désespérer qu'il ne réapparaisse un jour. Ça fait maintenant 2 ans que chaque nuit de pleine lune je les passe sur ce canapé face à la baie vitrée. La forêt qui s'étend dans le parc regorge pourtant de bêtes féroces, tous ces bruits qui se font entendre sont des rugissements, mais depuis cette fameuse nuit, il y a deux ans, je n'en ai plus vu un seul. A mon plus grand désespoir. J'aimerais, j'aurais aimé le revoir, mais il n'est plus jamais venu. Pourquoi est ce qu'il m'a laissé ? Je ne devais pas être assez bien pour lui, mais moi j'aurais tant aimé partir avec lui.
Il était si beau, si doux, si parfait. Quand j'ai vu sa peau si blanche, ces yeux d'un bleu profond et ces cheveux si noirs, apparaître à la lisière de la forêt, j'ai cru que je rêvais. Puis il s'est approché, et j'ai senti son parfum. Un parfum si sauvage, musqué, mais si rassurant, un parfum impossible à imaginer, mais qui depuis ce jour est gravé dans ma mémoire à jamais.
A l'époque j'avais 18 ans, aujourd'hui j'en ai 20, seulement j'ai toujours eu l'impression d'être un petit fille trop naïve pour ce monde, trop fragile pour survivre dans cette société impitoyable, qui m'a déjà fait tant souffrir. Pourtant cette nuit-là j'avais l'impression d'être à l'abri, que j'avais la force de tout affronter pour lui. J'étais si bien dans ces bras. Mais il est parti... sans moi, mais avec la promesse de se revoir. Cette fois...
Je me promenais au clair de lune, aux abords de la forêt du domaine, quand il a surgi sans prévenir. Je ne l'avais jamais vu, pourtant j'avais l'impression de le connaître depuis toujours. Il c'est approché alors que je n'osais plus bouger, lentement il a caressé mes cheveux avant de replacer une mèche rebelle derrière mon oreille. Sa main a effleuré ma joue en une légère caresse. Puis toujours sens parler il m'a pris la main et a continué sa promenade avec moi. Légèrement à chaque pas, comme pour ne pas m'effrayer, il se rapprochait un peu plus de moi. Il fini par passer sa main autour de ma taille, pour me serrer toujours plus contre lui . Cela faisait des heures que nous marchions, pourtant aucun mot n'avait encore été échangé. Le silence qui était présent n'était pas lourd, il était rassurant, nous n'avions pas besoin de mots pour nous comprendre, seuls nos regards et caresses suffisaient. La pleine lune seule était témoin de cette rencontre magique.
Puis la nuit a laissé place à l'aube, nous avions marché toute la nuit sans échanger un seul mot. Alors que le soleil faisait son apparition, il s'est enfin adressé a moi :
« Cassandre... Ma Cassandre, le soleil est bientôt là. Je dois partir. Pour mon plus grand malheur. Mais je reviendrai... je te le promets... »
Sa voix était douce, chaude, et tellement aimante. De savoir qu'il allait me quitter, et de ne pas savoir quand je pourrai enfin le revoir, me fit monter les larmes aux yeux. Pour me réconforter il me prit dans ces bras.
« Chut, ne pleure pas, personne ne mérite de faire couler tes larmes. »
Je relevais la tête pour pouvoir une dernière fois admirer la profondeur de ses yeux, quand il passa sa main sur ma joue pour rapprocher nos lèvres. Ses lèvres était si chaudes sur les miennes, je me perdis dans ce baiser. Il était chaste, doux, pourtant il fut le meilleur baiser qu'il m'ait été donné de recevoir. Mais trop vite notre étreinte fut rompue et avant que je n'ai eu le temps ne serait-ce que lui demander son nom il avait disparu dans l'obscurité de la forêt.
Depuis, je suis seule dans cet immense château. Il m'y a laissée, seule, ce n'est pas la première fois qu'on me laisse, mais ça a été la dernière. Je ne peux plus vivre comme ça. Je ne peux plus l'attendre, il faut que j'agisse pour qu'il me revienne. Je n'en peux plus de pleurer toutes les nuits sur mes amours perdus. Une fois j'ai aimé un homme, je pensais qu'il était mon seul amour. Mais il est parti, il ne voulait pas, mas le destin est impitoyable. Le jours de mes 18 ans il est mort, a à peine 20 ans il a fini sa vie, à la suite d'un tragique accident. J'ai cru mourir avec lui. J'ai cru que mon coeur était parti avec Nathaniel. Pourtant la pleine lune suivante je l'ai rencontré, lui, mon bel inconnu. Sans lui il y a longtemps que j'aurai entamé mon voyage vers l'infini, depuis la plus haute tour du château. Il m'a redonné l'espoir qu'un jours je pourrai à nouveau être heureuse avec quelqu'un. Ça fait maintenant deux ans jour pour jour que je l'attends. Par la fenêtre je vois l'aube qui approche, elle sera bientôt là, mais il n'est toujours pas venu.
Je me lève du divan et commence l'ascension des escaliers de la tour du château. Ma longue et lourde robe ralentit ma progression, mais je ne m'arrêterai pas, pas cette fois. Je ne veux plus attendre, alors moi je vais le provoquer, le destin. Je vais lui montrer qu'on peut avoir raison de lui pour trouver l'amour. Je vais lui montrer moi, que je ne suis plus la petite fille naïve et peureuse qui m'a fait attendre deux ans. Maintenant je suis une femme qui prend sa vie en main.
J'arrive enfin en haut de la tour. La nuit est belle, la forêt s'étend au pied du château, je n'en vois pas la fin, elle est immense. Au loin derrière les montagnes je vois le ciel devenir orange, l'aube ne va plus tarder. Je n'ai plus le choix, il faut que je le fasse maintenant où je devrai attendre la prochaine pleine lune. Je m'avance et monte sur les créneaux de la tour. J'arrange une dernière fois ma robe, et mes cheveux. Je veux être belle une dernière fois. Je n'ai plus peur, je fixe l'infini devant moi. Et voilà j'ai fait le premier, mais aussi dernier, pas, maintenant je tombe. Un sourire s'étend, une dernière fois, sur mes lèvres...
Je me réveille doucement. Il fait encore nuit. Je crois que je me suis évanouie, je ne sais plus vraiment ce qu'il s'est passé. Je me redresse en faisant attention. Je suis dehors, devant moi s'étend la forêt. Je me mets debout, je suis pas comme d'habitude, je me sens étrange, plus légère. Je regarde partout autour de moi. Que c'est il passé ? La chute, je me souviens, je lève la tête, je suis bien au pied de la tour. Mes yeux écarquillés se baissent. A mes pieds se trouve un corps, mon corps... Il est là, mort... Je reconnais ma robe du soir rouge, mes long cheveux couleur de jais s'étalent autour de la figure trop blanche. C'est moi, j'en suis sûre. J'observe les alentours, perdue.
-Cassandre, ma Cassandre, tu es là, je t'attendais.
Je me retourne brusquement en reconnaissant cette voix, et me jette dans ses bras en le serrant de toutes mes forces. Il a toujours ce même parfum qui me donne cet impression de sécurité. De le revoir, de le sentir contre moi me conforte dans mon idée. J'ai bien fait de mourir, je vais pouvoir revivre avec lui.
-Qu'est ce que tu m'as manqué... Si tu savais combien je t'aime...Nathaniel...
C'est lui, maintenant je le sais. Je l'ai enfin reconnu, pourquoi m'a-t-il fallu temps de temps pour m'en apercevoir ? C'est étrange. Mais je sais que ces yeux si profonds, dans lequel je me perds, lui appartiennent. Ces cheveux noirs aussi reconnaissables, tout maintenant me dit que c'est lui. Et ses lèvres, si douces et si chaudes qui se posent sur les miennes, je pourrais les reconnaître entre mille. Je me perds, cet fois encore, dans son baiser, ça fait tellement longtemps. Je pourrai rester toute ma vie comme ça dans ses bras. Mais il faut qu'on parte... l'aube est là.
***
Je me réveille dans un brusque sursaut. Je suis assise dans mon lit. Je suis seule. Je cligne des yeux et observe la chambre. C'est une chambre banale, blanche, les rideaux tirés sont rouges, une grosse armoire contre le mur, en face du lit une télévision. Je m'extirpe des draps et mets mes pantoufles. Je m'approche de la fenêtre, dehors il fait jour, mon réveil indique 9h. Heureusement c'est le weekend. Sans plus attendre je rejoins la cuisine pour petit déjeuner.
Je sors le lait du frigo et m'en sert un grand bol, comme tous les matins, j'y ajoute trois cuillères de chocolat en poudre avant de mettre le tout au micro-ondes. Mes matins sont tous les mêmes, il me faut cette routine pour garder les pieds sur terre dans ma vie chaotique. Alors que j'observe mon bol tourner, deux bras enserrent ma taille et des lèvres se posent sur ma nuque.
-Alors mon coeur, bien dormi ?
-Non pas vraiment, tu sais aujourd'hui c'est notre anniversaire.
Le corps se rapproche un peu plus de moi, comme pour me donner un maximum de sa chaleur. Il ne me répond pas, mais je sais que pour lui non plus ce n'est pas facile. Ce n'est jamais facile, même avec les années.
Je finis mon repas en silence, il reste à mes côtés, m'attendant patiemment. Je finis de préparer les sacs pour partir, comme chaque année un long voyage nous attend. Le voyage en voiture est tout aussi silencieux, nous n'échangeons que quelques banalités pour passer le temps, mais surtout pour oublier ce qu'il va se passer ce soir.
Il pleut quand nous arrivons enfin dans le petit village, c'est bien, ça reflète notre humeur. La nuit commence à tomber, nous avons voyagé toute la journée, nous sommes loin de Paris, mais assez proches pour faire le voyage quand même.
Mon mari s'approche de moi et me serre très fort dans ses bras. Mes lèvres cherchent les siennes, quand enfin elles les trouvent notre baiser a un goût d'adieu. Je déteste cette impression que jamais plus je pourrai le revoir. Puis brisant notre entraîne il s'éloigne vers la forêt. Les ténèbres de cette dernière l'englobe d'un coup. Quelques larmes s'échappent de mes yeux maintenant que je ne le vois plus. Mais je n'ai pas de temps pour ça, plus tard peut-être, mais pour le moment je dois moi aussi partir, pour revivre ma nuit de mon côté.
***
Je me relève après la chute que je viens de faire du haut de la tour, il m'attend. Cette année-là nous avons, encore une fois, réussi à nous rejoindre. Je ne n'espère jamais découvrir ce qu'il se passerait si une année nous échouons. Mais l'heure n'est pas aux interrogations, nous nous hâtons de regagner les sous-bois, avant que l'aube ne soit totalement levée.
Une fois sous le couvert des arbres la nuit reprend le dessus, plus aucun rayon de soleil ne filtre. Nous continuons quand même à marcher à l'aveuglette. La forêt, nous la connaissons depuis le temps, peu de choses change d'une année sur l'autre. Enfin nous arrivons au coeur de la forêt, là où naît toute la magie du monde. Nous nous installons tous les deux en tailleur face à face en nous tenant les mains.
Je plonge mes yeux dans les siens quelques secondes, juste le temps d'y puiser le courage, et de lui montrer tout mon amour. Puis, dans un synchronie parfaite, nous fermons les yeux. Les secondes, les minutes, les heures défilent sans que nous n'ayons bougé. Au bout de ce qu'il me semble être une éternité, je sens enfin le vent se lever. Il nous entoure, nous englobe, ce vent porte la magie du monde, il est le souffle de la forêt. Ce vent nous soulève comme si nous étions des plumes. Je me sens bien, comme dans un nid, comme dans le ventre d'une mère. Un flux de magie circule dans mes veines, j'ai l'impression de reprendre vie. Puis tout s'arrête, doucement le vent nous repose au sol. Ce vent si puissant, il y a quelques secondes encore, devient tout aussi léger qu'une brise. Lentement je rouvre les yeux pour tomber sur ceux apaisés de mon compagnon. Nous nous fixons sans bouger. Cette expérience est tout bonnement incroyable.
Entre nous se trouve un bouquet de fleurs atypique. Ce sont des cyclamens rouge sang maintenus ensemble par du lierre. Chaque année le même bouquet de fleurs est là. Et chaque année nous en faisons la même chose. Mais cette année je sais enfin ce qu'il veut dire. Les cyclamens pour les sentiments durables, le lierre pour la fidélité éternelle et enfin le rouge pour le sang, pour la vie, pour la passion...
En me levant je ramasse le bouquet. Main dans la main nous nous dirigeons tous les deux vers le village pour rejoindre enfin notre voiture, après les difficultés de la nuit. Mais le chemin est encore long avant d'avoir fini notre épreuve.
Une fois à la voiture il n'est pas encore temps de se reposer, nous avons une dernière chose à faire avant de partir jusqu'à l'an prochain. Nous montons donc dans la voiture pour faire les quelques kilomètres qui nous séparent de notre dernier lieu de rendez-vous.
Les tombes sont là, toujours aussi blanches. Nous avançons vers les deux tombes. Elles n'ont pas encore été fleuries cette année, nous sommes les seuls à les fleurir, chaque année à la même date. Je pose délicatement les fleurs sur le marbre avant d'aller me poster au côté de mon amour pour lire les inscriptions.
Nathaniel Desprès 1700-1720 et Cassandre Leroy 1702-1722
Alors que je prends la main de mon conjoint les inscriptions des tombes s'effacent peu à peu. Il ne reste plus aucune trace de ces dernières sur les pierres tombales d'une blancheur immaculée, comme si la mort avait elle-même été effacée.
Je lève les yeux pour observer le château, mais plus spécialement pour regarder le haut de la tour, au pied de laquelle nous sommes. Cette tour qu'il y a quelques centaines d'années j'ai gravi pour mettre fin à mes jours. Mais cette nuit que j'avais cru la dernière fût en réalité que le commencement. C'est cette nuit là que j'ai rejoins Nathaniel dans l'éternité et qu'ensemble nous sommes devenus des immortels. Mais cette nuit ne fût pas sans conséquence sur notre vie, nous sommes obligés de la revivre chaque année. Nous refaisons inlassablement ce rituel qui nous permet de continuer à vivre décemment.
Nathaniel me prend dans ses bras, sa bouche se pose doucement sur sur la mienne. Nos lèvres se caressent délicatement, nos langues se mêle dans une danse passionnelle. Cette fois notre baiser est empli de soulagement, d'amour, nous avons un an, un an à nous aimer avant de recommencer tout ceci. Il nous a fallu mourir, pour se trouver, maintenant on doit payer pour garder en vie cet amour. Lentement nous nous séparons, je regarde une dernière fois cette tour, je la retrouverai l'an prochain.
-Cassandre ? Tu viens ? Il nous reste encore une longue route à faire pour rentrer.
Main dans la main nous nous éloignons du château sans un regard en arrière. Nous avons rendez vous avec lui encore l'an prochain, et nous avons bien l'intention de gagner ces prochaines années.
FIN
Alors qu'est ce que vous en dites ? C'est pas trop nul ?