Une fille de pasteur de Georges Orwell Eric Arthur Blair, alias George Orwell, est né en 1903.
Après des études à Eton, il s'engage dans la police impériale en Birmanie, où il restera de 1922 à 1927. Après un passage à Paris, il rentre à Londres où il vit comme précepteur puis professeur en 1932, avant de devenir libraire et critique. Il publie plusieurs romans et reportages dans les années trente, remarquables par leur engagement social et politique, dont Hommage à la Catalogne en 1938 sur la guerre d'Espagne. Il devient mondialement connu après la guerre grâce à deux livres, La Ferme des animaux et 1984, publié peu avant son décès en 1950.
Fille unique, Dorothy vit une existence morne avec son père, le pasteur acariâtre d'une petite paroisse du Suffolk. Frappée par une soudaine amnésie, elle se retrouve à la rue et va partager l'existence des déshérités, des clochards de Londres aux cueilleurs saisonniers de houblon. Mais, à mesure que la mémoire lui revient, Dorothy trouvera-t-elle en elle-même la force d'aspirer à une autre vie ?
Publié en 1935 et inédit en français, Une fille de pasteur est l'un des premiers romans de George Orwell. Avec une lucidité et une acuité implacables, Orwell dépeint l'hypocrisie, la pauvreté et la misère spirituelle qui vont accompagner Dorothy dans son odyssée à travers l'Angleterre des années trente.
L’histoireAlors, ce livre est une plongée dans les années trente, en Angleterre, avec une jeune femme névrosée à souhait, qui va découvrir l'horreur de la misère, de la faim, du froid ! C'est fascinant de voir à quel point, sa petite vie tranquille et pourtant frustrante (se lever à 5 heure pour aller prier, se piquer avec une aiguille à chaque "mauvaise" pensée... ) va devenir un doux rêve, un doux souvenir face à tout ce qui va lui arriver par la suite. Mais, elle même va un peu oublier tout ce "confort" pendant un laps de temps et devenir une parfaite inconnue qui rode, mendie, bref, une paria.
L'histoire est déroutante, touchante. Loin de 1984 autant dans le style que dans le fond, l'auteur nous donne une part de son éducation, des moments qu'il a vécu, avec notamment ce passage sur les sans-abris. Orwell a voulu tenter cette expérience, à Paris en 1927 et il nous donne ici froid et faim... avec une présentation assez singulière de ce climat social, de ces évènements affreux relatés avec un petit sourire narquois !
Mais ce livre est aussi un pamphlet contre l'église en général, avec des réflexions sur la mendicité alors que le pasteur continu de prier pour les bonnes âmes... Le père de Dorothy est assez infect. Imbu de lui même, refusant tout forme de charité... envers les autres et surtout sa fille, il vit reclus dans un passé imaginaire et joue l'argent destiné au ménage, rendant la situation de la paroisse désastreuse. Que dire des autres protagonistes ? Un manque cruel d'ouverture et de pardon... des bien-pensants très pédants !
Enfin, dans la troisième partie, une analyse assez poussée des méthodes éducatives et écoles de ce début de siècle, donne la chair de poule. franchement, je pense que nous ne devrions plus nous plaindre de notre système éducatif, au regard des effroyables maison à apprendre que Orwell dénonce. L'argent comme seul moteur et seul programme scolaire !
Mais revenons à Dorothy qui passe au travers tous ces paysages et vit une sorte de road movie avant l'heure. Elle affronte chaque nouvelle épreuve avec un calme incroyable, refusant de se laisser aller à la déchéance totale. certes, c'est un peu irréaliste et parfois tiré par les cheveux... je doute que des hommes la laissent si "pure" la voyant dans cet état d'isolement et de pauvreté. Mais ce n'était pas le but de Orwell et il a volontairement gardé son héroïne chaste. Il aborde un peu le sujet dans la dernière partie (et une petite touche dans les premiers chapitres, surtout pour décrire le caractère de Dorothy) mais sans l'approfondir.
Le style« Lorsque le réveil retentit sur la commode telle une épouvantable petite bombe de bronze, Dorothy, arrachée des profondeurs d'un rêve complexe et troublant, sursauta et se redressa en regardant les ténèbres dans un état d'épuisement extrême. »
Georges orwell.
Le livre en lui même n'égale pas les deux derniers, mais donne une autre vision de l'écriture de cet homme. Un humour décapant pour décrire les abysses de la mesquinerie petite-bourgeoise. (Nouvel Observateur - Aude Lancelin) et surtout la facilité déconcertante qu'il a pour décrire Dorothy et son environnement, ou encore l'horrible tenancière de l'école... le fabuleux personnage (dont j'ai oublié le nom) qui accompagne Dorothy lors de son périple dans les houblonnières.
J'ai eu un peu de mal avec la partie se déroulant à Londres que Orwell a choisi de traiter comme une pièce de théâtre avec pratiquement que des dialogues. C'est un peu embrouillé au départ, le temps de comprendre qui sont les protagonistes puis, cela devient surtout lassant.
Pour le reste du livre, on rencontre quelques imperfections et erreur de jeunesse... avec des lourdeurs et des répétitions. Le tout se lit pourtant très bien et dévoile, déjà, le grand talent de cet auteur.
Au finalUn livre à découvrir si vous connaissez déjà l'auteur. Sinon, je vous conseille de lire La Ferme des animaux ou 1984 qui sont bien plus probant de son talent.