Bubble gum (Lolita Pille)

Bubble gum

Lolita Pille



Synopsis : De nos jours, Cendrillon s'ennuie à servir des pastis dans un bistro de province. Le bal dont elle rêve, c'est celui des photos de mode, du cinéma et de la presse people. Ce rêve, Manon va s'efforcer de le réaliser. Elle est jolie, et il ne lui faut qu'un peu d'audace et une robe empruntée pour se glisser dans les soirées parisiennes de la jet set, où elle rencontre Derek, un milliardaire désabusé qui grille sa vie entre la drogue, l'alcool et les orgies. C'est cet homme qui va lui tendre un piège terrible, l'amener au bord de la déchéance et de la folie....

Mon avis : J'ai vraiment apprécié ce second roman de Lolita Pille, et le moins que l'on puisse dire, c'est qu'on ne s'ennuie pas une seule seconde en le lisant. L'auteur parvient à nous tenir en haleine jusqu'à la fin du récit, et les retournements de situation et les surprises ne cessent de s'accumuler, ceci jusqu'à la toute dernière page, nous laissant parfois complètement ahuris devant un tel machiavélisme. En outre, on assiste peu à peu à l'évolution - ou plutôt à la régression - de Manon, ce qui est plutôt intéressant. On réalise alors que la célébrité peut monter à la tête de certaines personnes jusqu'à les rendre totalement abjectes, et que certaines jeunes filles n'hésiteraient pas à vendre leur âme au diable pour un quart d'heure de gloire et de paillettes. On s'interroge d'ailleurs beaucoup à ce sujet à la lecture de ce livre, et on réalise que ce milieu est bien souvent corrompu et pas si alléchant qu'il ne semble l'être de l'extérieur. Le personnage de Derek est également très intéressant, car on peut d'une certaine façon concevoir que l'argent l'ait poussé à commettre les choses les plus horribles, ceci dans le seul but d'oublier son ennui et sa solitude. D'ailleurs, on s'interroge jusqu'à la fin sur son véritable ressenti vis-à-vis de Manon, et on constate finalement qu'il était plus humain qu'il ne le paraissait. Ces deux personnages principaux ne sont guères attachants, mais on prend plaisir à essayer de les comprendre, même si le machiavélisme de Derek et l'arrivisme de Manon agacent au plus haut point.

En ce qui concerne la fin du récit, elle est magistralement orchestrée. C'est bien simple, on ne s'attend pas du tout à une telle chose, et après réflexion on se demande comment on a pu être ainsi bluffé depuis le début. J'ai trouvé ce retournement de situation assez juste d'une certaine façon en ce qui concerne Derek, et j'ai aimé la façon dont il dénonçait le manque de scrupules des émissions de télé réalité ainsi que le voyeurisme des télespectateurs. La seule chose que je regrette, c'est que ça manque toutefois en crédibilité. Bubble gum est malgré tout un livre très intéressant et très prenant, et on ne peut que se demander si Manon ne se serait pas trompée de rêve, finalement, et ce malgré sa véritable célébrité finale. J'aurais toutefois aimé que certains points soient plus approfondis. Je pense notamment à Julie, l'ex petite amie de Derek qui est souvent mentionnée et dont on sait finalement peu de choses, alors qu'elle semble tout de même avoir eu un impact sur la psychologie de celui-ci.

Citations

- J'ai décidé de détruire quelqu'un, briser une existence, massacrer un destin, par hasard, et tout à fait injustement, choisir un innocent, quelqu'un qui pourrait être heureux, qui n'a pas encore été corrompu, qui croit en tout, la vie devant lui, l'espoir, et en faire une épave dans mon genre, quelqu'un qui dort en ce moment, rêve d'amour, et d'avenir, sans se douter une seconde que je viens de décider sa perte. Et juste à cet instant, j'ai cessé de m'ennuyer.

- "S'il y a quelque chose qu'on ne pardonne pas à quelqu'un, c'est d'être doué de tout ce à quoi n'importe qui aspire."

- Dans ce monde, des millions d'êtres, relativement normaux, donc plutôt laids et plutôt bêtes, comme le veut la norme, revendiquaient leur droit d'aller montrer leur laideur et leur bêtise à des millions d'autres êtres laids et bêtes, qui se délectaient du pathétique de leurs semblables, ignorant qu'en fait d'écran, il n'y avait qu'un miroir. On paierait le miroir en vingt-quatre mensualités, et pour éviter de trop se serrer la ceinture, on contracterait un prêt, pour rembourser le crédit, et peut-être un autre prêt, pour rembourser le premier. Puis, quand on aurait les huissiers au cul, on passerait de l'autre côté du miroir, pour aller témoigner. [....] L'art était subjectif, la Ce mot n'est pas de notre langage, parlez correctement ! était universelle.